Cette photo fait partie de la série « Douce France ». Douce France, c’est une chanson de Charles Trenet, écrite dans les années 40. C’est une drôle de petite mélodie, vu d’aujourd’hui, mais qui en dit long sur une France que l’on ne connaît plus. Alors, un peu à la manière de Patrick Modiano, je suis allée à la recherche de cette France oubliée, que je perçois souvent au détour d’une rue ou dans un éclat de voix rempli d’un accent perdu. Je suis sortie un soir avec mon appareil et j’ai capturé des instants, des lieux vides de sens pour beaucoup mais pleins d’images pour moi, en espérant qu’ils le deviendront pour vous.
Sur ces deux photos, ce que j’ai aperçu c’est l’harmonie architecturale de l’abbatiale. Des voutes, des plafonds qui s’envolent, des demi-cercles, des rangées de piliers massifs, des murs finement colorés dont les restes de peinture sont révélés par le soleil du soir passant à travers les vitraux. J’imaginais un architecte, au Moyen Age, dessiner l’édifice à grands traits fiévreux. Puis les moines qui défilent dans le choeur, emplissant l’espace de chants latins. Les pierres sur lesquelles ces échos ont dû résonner en sont encore imprégnées. Puis, bien plus tard, un jeune curé, maigre sous sa soutane, qui s’entretient à voix basse avec la fille du comte, après la messe, vers la grande porte d’entrée. Elle a laissé sa bicyclette dehors et tient à avoir un oeil dessus, pour le cas où il se mettrait à pleuvoir.
